L’argent déposé sur votre compte Nickel, Lydia ou Revolut est-il, comme votre compte courant classique, protégé à hauteur de 100 000 euros ? Que se passe-t-il si la banque qui abrite les fonds collectés par la néobanque dépose le bilan ? Ces questions, nous les avions posées il y a près de 2 ans au Fonds de garantie des dépôts et de résolution mais le débat n’avait pas été tranché. C’est désormais le cas.
Pas de condition d’éligibilité, une ouverture de compte ultra-rapide et des tarifs clairs et compétitifs : les néobanques intéressent, de fait, une part croissante de la population. En atteste le succès du compte Nickel qui, moins de 5 ans après son lancement, vient de franchir la barre symbolique du million de comptes ouverts. Il faut dire que les prestations des néobanques ressemblent à celles des établissements traditionnels : carte bancaire, émission et réception de virement, paiements et retraits en France comme à l’étranger… Le b.a.-ba des services que l’on demande à sa banque ! Effectivement, du point de vue du client, seules l’impossibilité d’être à découvert et l’absence de chéquier peuvent permettre de distinguer un compte Nickel, Revolut, N26 ou encore C-zam d’un compte courant dans une banque de plein exercice. Il existe pourtant une différence fondamentale : le mécanisme de protection des clients en cas de faillite.
La garantie des dépôts activée pour les seuls établissements de crédit
Les « vraies » banques – concrètement les enseignes disposant d’un agrément d’établissement de crédit délivré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) – adhèrent et cotisent au Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR). Résultat, si une banque fait défaut, ce fonds va débloquer les avoirs nécessaires pour permettre le remboursement de ses clients, dans la limite de 100 000 euros par déposant (un plafond indépendant est appliqué pour les livrets d’épargne réglementée hors Livret Jeune). Un tel système de garantie n’est pas propre à la France, chaque pays de l’Union européenne est doté d’un fonds national. Par ailleurs, la mise en place d’un système européen de garantie, en cas de défaut d’une banque systémique, fait régulièrement l’objet de discussion à Bruxelles.
Mais cette protection ne s’applique qu’aux seuls dépôts bancaires, ce que n’est pas – juridiquement – l’argent hébergé sur un compte de paiement d’une néobanque. « La garantie des dépôts couvre les établissements de crédit. Sans agrément d’établissement de crédit délivré par l’ACPR, les dépôts ne sont pas couverts », nous a ainsi résumé Thierry Dissaux, président du directoire du FGDR. « Les clients ne pensent pas toujours à s’interroger sur le statut et les modes de couverture de ces nouveaux acteurs. Ils ont l’impression d’utiliser des services de nature bancaire, mais derrière, ce ne sont pas nécessairement des établissements de crédit qui sont aux commandes », poursuit-il. Or, « les comptes des clients d’un établissement de paiement ne sont en aucun cas couverts par la garantie des dépôts en cas de faillite de l’établissement de paiement ».
Dans le détail toutefois, le mécanisme de couverture n’est pas aussi binaire. Selon la nature de la néobanque et l’origine du défaut, le FGDR peut indemniser ses utilisateurs.
C-zam couvert via Carrefour Banque
Le critère déterminant dans le déclenchement du fonds de garantie des dépôts est l’agrément de l’enseigne qui fait faillite : celle-ci doit être un établissement de crédit. De fait, les néobanques qui s’avèrent être des marques commerciales de « vraies » banques sont prises en charge par le FGDR. « Les services de banque en ligne, comme C-Zam ou Hello Bank, délivrés par des établissements de crédit agréés en France, respectivement par Carrefour Banque et BNP Paribas, sont couverts par la garantie des dépôts au titre de l’agrément bancaire de leur distributeur », détaille le président du directoire du FGDR. Dans cette catégorie, on retrouve également le compte Eko fourni par le Crédit Agricole, ou la récente offre Enjoy des Caisses d’Epargne.
S’agissant d’offres commerciales d’établissement de crédit, les dépôts sur ces néobanques s’ajoutent aux autres avoirs détenus dans cette banque, l’ensemble étant garanti à hauteur de 100 000 euros. Concrètement, si un client détient respectivement 51 000 euros et 47 000 euros sur un livret et un compte à terme Carrefour Banque et 10 000 euros sur un compte C-zam, soit 108 000 euros en tout, celui-ci perdrait 8 000 euros en cas de faillite de Carrefour Banque.
Les clients de N26 protégés par le fonds allemand
Deuxième catégorie de néobanque : les établissements de crédit qui délivrent des services de paiement à l’étranger. C’est le cas de N26. Dans son pays d’origine, en Allemagne, N26 est une banque de plein exercice qui octroie des crédits en nom propre. Par conséquent, elle cotise outre-Rhin au fonds de garantie allemand, qui offre le même niveau de protection qu’en France. En effet, suite, à la crise financière de 2008, le niveau de garantie a été harmonisé à 100 000 euros par banque et par déposant dans l’ensemble de l’Union européenne. Bilan, en cas de défaut de N26, ses utilisateurs français sont indemnisés, comme s’ils détenaient un compte dans une banque traditionnelle française.
En revanche, ce n’est pas le cas des clients du principal rival de N26 en France : Revolut. La fintech britannique ne dispose pas d’une licence bancaire, mais du statut d’établissement de monnaie électronique. C’est la raison pour laquelle elle ne distribue que des cartes prépayées. Autre conséquence, les dépôts de ses utilisateurs ne sont pas couverts par un fonds de garantie national. Une situation qui n’est pas propre à Revolut. Pour les mêmes raisons – pas d’agrément d’établissement de crédit et une offre qui n’est pas une marque commerciale – l’argent hébergé sur les comptes Nickel, sur Lydia ou sur Pumpkin n’est pas non plus protégé par un système de garantie des dépôts. « Le FGDR ne couvre pas les établissements français et étrangers qui ne relèvent pas d’un agrément bancaire, comme Compte-Nickel et Revolut », souligne Thierry Dissaux.
Le cantonnement pour prévenir les défaillances
Toutefois, cela ne signifie pas qu’en cas de défaut de ces acteurs leurs utilisateurs perdront leurs deniers : « Il existe d’autres mécanismes de protection », rappelle le président du FGDR. « En l’occurrence, pour les établissements de paiement, la réglementation prévoit, parmi d’autres options, la possibilité d’un compte de cantonnement propre aux actifs de leur clientèle, ouvert dans un établissement de crédit ». Ce compte de cantonnement, compte distinct dans lequel la néobanque n’est pas autorisée à puiser, abrite l’ensemble des dépôts de ses clients. En clair, en cas de faillite, les avoirs des utilisateurs sont séparés des fonds propres de la néobanque. Ils pourront donc retrouver leurs dépôts.
En revanche, que se passe-t-il si la banque, où le compte de cantonnement est hébergé, connaît de graves difficultés financières ? Le compte de cantonnement est-il considéré comme un compte courant et garanti à hauteur de 100 000 euros, les utilisateurs de la néobanque devant alors se partager cette somme, ou bien, chaque client bénéficie-t-il d’une garantie individuelle ? En octobre 2016, quand cBanque avait interrogé le FGDR, celui-ci n’avait pas su nous répondre. Deux ans plus tard, cette question a été tranchée : « Si l’établissement de crédit dans lequel le compte de cantonnement est ouvert venait à être défaillant, le fonds de garantie des dépôts indemniserait l’établissement de paiement pour le montant des encours de sa clientèle, toujours dans la limite de 100 000 euros par client », nous a expliqué Thierry Dissaux.
Autrement dit, en cas de défaut de la banque de cantonnement, les clients de la néobanque disposent du même traitement que les clients directs de l’établissement bancaire. Ils sont indemnisés à hauteur de ce qu’ils avaient sur leur compte de paiement, dans la limite 100 000 euros. Une somme, donc, très confortable pour des comptes destinés à un usage quotidien.
De plus, cette garantie indépendante de 100 000 euros par compte de paiement est valable même si le client détient par ailleurs des avoirs dans la banque qui fait défaut. Celui-ci bénéficiant donc d’une double garantie : 100 000 euros au titre de son compte de paiement dans la néobanque et 100 000 euros au titre de l’argent détenu en direct dans la banque. « Dans le système français, si l’établissement bancaire dans lequel sont cantonnés les avoirs de la clientèle d’une néobanque venait à faire défaut, et que certains clients de cette néobanque disposaient aussi de comptes personnels dans l’établissement bancaire utilisé par la néobanque, ces clients seraient indemnisés par le FGDR pour leurs comptes tenus par l’établissement défaillant jusqu’à un maximum de 100 000€ chacun, tandis que la néo-banque recevrait du FGDR au nom de ces clients une somme correspondant à leurs avoirs dans la limite de 100 000€ chacun. Ce dernier mécanisme vise à réduire l’impact de la défaillance de la banque sur les activités de la néo-banque », nous a confirmé le FGDR.
- Par Marie-Eve FRÉNAY
https://www.cbanque.com
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