Les vents sont décidément contraires pour le patron du Crédit mutuel Arkéa, Jean-Pierre Denis, qui veut faire sécession du groupe Crédit mutuel. Après une mise en garde très sévère des autorités bancaires, il est aussi obligé d’annuler la manif tous frais payés qu’il voulait organiser à Paris.
Jean-Pierre Denis, le patron du Crédit mutuel Arkéa (qui regroupe les fédérations de Bretagne, du Sud-Ouest et du Massif central) affronte décidément des vents contraires. Alors qu’il vient de recevoir une lettre de mise en garde des autorités bancaires, il est de surcroît dans l’obligation d’annuler la manifestation patronale qu’il voulait organiser.
Le premier camouflet était déjà très sévère. Dans une lettre, la Banque centrale européenne (BCE) et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (APCR, l’organisme de supervision qui dépend de la Banque de France) ont prévenu le patron de la banque bretonne que chacune des 331 caisses locales appelées par lui à ratifier son projet de sécession, pour se séparer de la Confédération nationale du Crédit mutuel (CNCM) perdrait, dans cette hypothèse, leur statut coopératif et mutualiste et serait dans l’obligation de redemander individuellement leur agrément comme établissement de crédit (lire notre article ici).
Et voici que le patron de la banque connaît un nouveau camouflet – et cette fois, il peut ne s’en prendre encore qu’à lui-même : il est dans l’obligation d’annuler la manifestation patronale totalement atypique qu’il avait prévu d’organiser jeudi prochain pour essayer de faire pression sur le ministère des finances.
Cette annulation, les salariés en ont été prévenus par un mail adressé ce samedi matin par le prétendument collectif des salariés qui en avait pris l’initiative – collectif qui est en fait une création à peine masquée de la direction et de la Société des cadres dirigeants de l’entreprise. Voici ce message :
Les organisateurs font mine de prétendre que plus de six mille personnes étaient inscrites pour la manifestation et qu’elle aurait donc été massive si « les autorités responsables de la sécurité et de la manifestation » ne les avaient finalement en dernière minute dissuadées de venir à Paris. Pour le nombre des salariés, c’est évidemment invérifiable – peut-être y en a-t-il eu beaucoup moins, ce qui expliquerait l’annulation. Mais il est incontestable que la grève de la SNCF est venu contrarier le projet. Pendant un temps, Jean-Pierre Denis a donc espéré parvenir à monter un système de covoiturage et de cars, permettant de maintenir la manifestation. Mais visiblement, il n’y est pas parvenu.
Par surcroît, la manifestation, tous frais payés par l’entreprise, avec le salaire maintenu, a fait l’objet de très vives critiques. L’entreprise avait-elle le droit de dépenser de l’argent pour une telle initiative ? N’était-ce pas une pression sur les salariés qui, ne souhaitant pas manifester, se seraient distingués auprès de leur hiérarchie en refusant de monter dans les cars ? Beaucoup de salariés ont en effet été choqués de cette très forte pression de la direction en faveur de cette manifestation quasi obligatoire. Voici par exemple une note qui a été adressée aux salariés pour les convier à venir à Paris.
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Cette initiative, sans réel précédent, avait donc pour conséquence de transformer l’entreprise en un lieu corporatiste, niant le principe de l’indépendance syndicale, et forçant les salariés à défendre une cause patronale.
Pour beaucoup de salariés, c’est donc un soulagement que Jean-Pierre Denis Denis ait été dans l’obligation d’annuler cette initiative. Témoin la réaction de la CFDT : « Notre organisation syndicale avait à de nombreuses reprises posé des questions relatives à l’encadrement légal de cette manifestation et aux conditions de sécurité (temps de travail, assurance en cas d’accident…), renvoyant notre employeur à ses responsabilités. Ces questions ont été posées en réunions d’instance du personnel ainsi que par mails et courriers. Nos diverses demandes écrites étaient restées sans réponses et, sans commenter l’aspect stratégique de cette manifestation, nous ne pouvons que nous féliciter de l’abandon de ce projet. La préservation de la santé physique et mentale des salariés ne semblait pas assurée pour cette manifestation. »
PAR LAURENT MAUDUIT
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