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Gouvernance renouvelée au Crédit Mutuel Arkéa. Pour se mettre dans la droite ligne des principaux établissements bancaires, le groupe basé à Brest vient, au cours de son assemblée générale, d’ouvrir son conseil d’administration à deux profils extérieurs indépendants. Il s’agit d’Anne-Sophie Grave, de la Caisse des Dépôts, et de Monique Huet, venue d’Engie, qui complètent quatre autres nominations en interne.

Cette gouvernance renouvelée correspond-elle à une évolution de votre stratégie d’indépendance ?

Aucunement ! Aujourd’hui comme hier nous souhaitons défendre notre liberté d’entreprendre et garder notre indépendance. Je rappelle que les résultats opérationnels et financiers de l’année 2016 n’ont jamais été aussi élevés. Notre résultat net a doublé en quatre ans. Notre groupe s’est doté de relais de croissance avec la banque en ligne, le marché des entreprises et des collectivités, nos activités en marque blanche… qui réduisent notre dépendance vis-à-vis de la banque de détail. Notre croissance est à la fois régulière, rentable et équilibrée, alors pourquoi casser ce qui marche ? Le Crédit Mutuel Arkéa a deux atouts principaux, sa solidité financière et sa taille, qui nous donnent de l’agilité. Ces qualités sont très attendues par nos clients à l’heure de la transformation digitale. Ce sont les raisons pour lesquelles nous refusons toute forme de centralisation. J’ajoute que 2017 s’annonce très bien avec un développement sur le même rythme que celui de l’exercice précédent.

 

La Confédération nationale du Crédit Mutuel reste sur ses positions et vous menace d’exclusion si vous ne rentrez pas dans le rang. Comment ferez-vous si la justice vous donne tort ?

Contrairement aux discours d’autosatisfaction que j’entends à la Confédération nationale du Crédit Mutuel, celle-ci ne s’est pas réformée. Les graves conflits d’intérêts entre la Confédération et le CM 11-CIC persistent. Le président de la Confédération continue d’ailleurs de cumuler cette fonction avec la présidence de CM 11-CIC. J’ajoute que nous assistons depuis quelques mois à des dérives inacceptables, des manoeuvres qui mettent en cause la neutralité et l’impartialité de l’organe central. Par ailleurs, l’Autorité de la concurrence vient, par trois fois en huit mois, de confirmer qu’Arkéa et le CM 11-CIC sont deux entreprises autonomes et concurrentes. J’ai toute confiance dans les décisions de justice. Trois contentieux sont en cours et devraient aboutir cette année. Il y a notamment celui qui concerne le principe de solidarité financière voté par la Confédération nationale contre l’avis de notre groupe. Nous avons déposé un recours au Conseil d’Etat, car comment imaginer que l’organe central puisse décider des transferts de fonds propres entre les différents groupes du Crédit Mutuel ?

En cas d’échec, pourriez-vous mettre en jeu vos mandats ?

La question n’est absolument pas là. La ligne du Crédit Mutuel Arkéa est fixée par ses actionnaires, et près de 97 % des présidents de caisse locale se sont exprimés, à bulletin secret, en faveur du projet qui vise à maintenir l’autonomie de notre groupe et obtenir des pouvoirs publics la création de deux organes centraux distincts. Nous mettons en oeuvre le mandat clair qui nous a été confié. Si on entrait, contre toute logique, dans la mécanique de centralisation engagée par la Confédération, il est certain que le Crédit Mutuel Arkéa en paierait le prix fort sur le terrain de l’emploi et en termes économiques.

Votre volonté d’indépendance respecte-t-elle les attentes de la Banque centrale européenne ?

Oui, je le crois. Nous ne demandons pas de régime dérogatoire, mais l’application de la loi bancaire européenne, qui prévoit la supervision directe des établissements de crédit par la Banque centrale européenne. Notre taille de bilan excède 120 milliards d’euros, nous sommes donc très au-delà des 30 milliards d’euros exigés par le régulateur européen. Contrairement à la Confédération, qui n’est pas représentative d’un groupe, nous sommes bel et bien un groupe au sens des règlements européens. J’ajoute que la BCE considère la perspective d’une séparation comme étant « parfaitement probable ». Le seul sujet qu’on accepterait donc de discuter avec la Confédération nationale est celui des conditions de notre séparation.

Stanislas du Guerny, Les Echos
Correspondant à Rennes.