Le Crédit Mutuel Arkéa a annoncé qu’il allait supprimer les frais d’incidents de paiement pour certains clients fragiles. La banque bretonne va-t-elle inspirer ses concurrentes ? Rien n’est moins sûr.
C’est ce qu’on appelle un joli coup. Vendredi dernier 1er février, la banque bretonne, maison mère des Crédits Mutuels de Bretagne, du Sud-Ouest et du Massif Central, annonçait qu’elle renonçait à facturer des frais d’incidents de paiements – commissions d’intervention, frais de rejet, lettres diverses, etc. – aux clients en difficultés financières, à condition qu’ils soient équipés de son offre spécifique clients fragiles (OCF).
50 000 clients, dont la fragilité financière a été détectée, sont concernés, annonce la banque. Potentiellement : tous en effet n’ont pas souscrit cette OCF. A l’échelle nationale, si toutes les banques ont en effet l’obligation de proposer une OCF , seul un client fragile sur 10, environ, en est équipé, selon la Banque de France.
Ce faisant, Arkéa va plus loin que l’engagement, pris par le secteur bancaire en septembre 2018, d’instaurer un plafond de frais de 20 euros par mois, et 200 euros par an, pour cette catégorie de clients.
Arkéa premier de cordée ?
Arkéa va-t-elle lancer la mode ? Peut-on envisager un alignement de ses concurrents sur cette exonération, voire le début d’une surenchère ? C’est peu probable. Nous avons en effet contacté les principales banques de la place pour connaître leurs intentions. Leurs réponses ont été rares. Le Crédit Mutuel Alliance Fédérale et Banque Populaire-Caisse d’Epargne (BPCE) n’ont pas donné suite. La Société Générale, elle, n’a pas souhaité fournir de réponse. Les autres (La Banque Postale, BNP Paribas, LCL) ont promis une réponse, qui n’est pas encore venue à l’heure de publier ces lignes.
Seul le Crédit Agricole nous a transmis sa position. Il fait le choix du statu quo : « Nous mettrons en place les recommandations FBF, soit 25 euros pour les clients fragiles et le plafond de 20 euros pour les clients fragiles détenteurs de l’OCF », écrit la communication de la banque verte, dont, il faut le rappeler, certaines des caisses régionales ont fait le choix d’instaurer un plafond de frais (300 euros par mois) pour tous leurs clients, fragiles ou non.
Un impact à nuancer
Le peu d’empressement des autres banques à répondre laisse supposer qu’Arkéa restera, au final, la seule enseigne à opter pour une telle exonération. Le coup de com’ est ainsi réussi, estime Fabien Tocqué, coordonnateur du pôle Economie de l’Union nationale des associations familiales (Unaf), en première ligne sur la question des frais d’incident. « Cela confirme que la problématique des frais en cascade est devenue une question d’image pour certains établissements, grâce notamment à l’action des associations et à la prise de conscience du grand public », estime-t-il. Pour autant, « cela ne devrait pas coûter grand chose à Arkéa. L’exonération ne concerne en effet que les bénéficiaires de l’offre spécifique. Offre qui, parce qu’elle intègre des moyens de paiement très restrictifs (carte à contrôle de solde, absence de chéquier), rend quasiment impossible le passage dans le rouge. »
L’OCF, de plus, « ne convient pas à ceux à qui on la propose, qui ont besoin de plus de souplesse pour boucler leurs mois », poursuit Fabien Tocqué, qui appelle de ses vœux d’autres solutions plutôt tournées vers la prévention : « Aujourd’hui, il faut être en grande difficulté, et donc payer déjà beaucoup de frais d’incidents, pour être détecté comme client fragile et bénéficier de l’OCF et des plafonds de frais. Il serait préférable d’agir plus en amont, et à destination de tous les publics. »
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