Les décrets encadrant la fourniture d’espèces dans le cadre d’une opération de paiement par carte – une pratique connue sous le nom de cash-back – sont attendus très prochainement. Les commerçants, premiers intéressés, vont-il jouer le jeu et accepter de fournir du cash à leurs clients ? Les réponses de Jean-Michel Chanavas
Jean-Michel Chanavas, quel est le point de vue des commerçants sur le futur encadrement de la pratique du cash-back en France, qui pourrait faire décoller son usage ?
Jean-Michel Chanavas : « Il faut rappeler qu’il s’agit d’une normalisation, à l’échelle européenne d’une pratique qui existe déjà de manière informelle. Il est logique que les commerçants français proposent également ce service, comme ailleurs en Europe. Cela correspond aux attentes des clients. »
Qu’attendent les commerçants des décrets à paraître ?
J-M. C. : « Une ouverture la plus large possible, mais aussi de la liberté pour les commerçants : liberté de fournir ou non le service, de le réserver à certains clients – les plus fidèles par exemple -, d’ajuster le plafond à leur guise… Nous attendons maintenant avec impatience la publication des décrets, histoire d’être fixés. »
Ce service aura un coût pour les commerçants qui le proposeront. Quel sera son modèle économique ?
J-M. C. : « Effectivement, le cash-back viendra grossir de quelques centimes la commission versée par le commerçant à sa banque. Ce n’est pas énorme, mais c’est un coût. Il présente toutefois certains intérêts. Celui par exemple de mieux satisfaire sa clientèle, en offrant un service supplémentaire. Celui aussi de se délester d’une partie de ses espèces, ce qui représente un gain de temps et surtout de sécurité. C’est pourquoi il ne serait pas judicieux de facturer un service qui, dans l’esprit des gens, n’a d’intérêt que s’il est gratuit. »
Les commerçants ont-ils vocation à se substituer aux banques pour la fourniture d’espèces ?
« Les gens ne vont pas se précipiter »
J-M. C. : « En France, contrairement à d’autres pays, il reste possible de retirer de l’argent gratuitement aux distributeurs. Les gens ne vont donc pas se précipiter sur le cash-back. Toutefois, c’est un service qui aura son intérêt pour certaines catégories de clients – les personnes âgées par exemple, qui craignent parfois d’utiliser les DAB – et dans certaines communes où les DAB se font rares. »
Quels seront selon vous les types de commerces les plus pertinents pour proposer ce service ?
J-M. C. : « Ceux, d’abord, qui reçoivent beaucoup de cash : les buralistes en premier lieu. La petite et grande distribution alimentaire, ensuite, en tant que service de fidélisation : Casino est d’ailleurs la première enseigne à lancer le cash-back à grande échelle, aux caisses en libre-service uniquement. Certains commerces plus spécifiques enfin, comme les stations services sur autoroute, qui ont l’obligation de fournir un accès aux espèces et pourraient en profiter pour remplacer les distributeurs automatiques par du cash-back.
N’y a-t-il pas un risque que le cash-back soit utilisé de manière frauduleuse ?
« Un usage difficile à détourner »
J-M. C. : « Le cash n’a, en général, pas bonne réputation, son usage est souvent entaché de soupçons de blanchiment. Dans le cas du cash-back, je ne vois pas comment son usage pourrait être détourné. Depuis le 1er janvier 2018, les commerçants sont soumis à de nouvelles obligations en matière de conformité des logiciels de caisse. Chaque opération de cash-back laissera ainsi dans leur comptabilité une trace impossible à effacer. »
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