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L’organe central de la banque mutualiste a mandaté Lazard pour évaluer les rétrocessions et indemnisations qu’il compte réclamer au groupe breton en cas de séparation.

Est-ce un pas dans la voie de la séparation entre le Crédit Mutuel et son affilié breton Arkéa ? Pour la première fois, ce mardi 19 juin, la Confédération nationale du Crédit Mutuel (CNCM), l’organe central du groupe mutualiste, évoque de façon concrète la possibilité d’une sortie du Crédit Mutuel Arkéa, que réclame ce dernier. Quand le divorce ne prend pas la voie du consentement mutuel, le conjoint qui ne souhaite pas la séparation demande sa part des biens du couple et une prestation compensatoire. Et la CNCM fait exactement cela : elle pose ses conditions financières à une sortie, sur le mode : « vous voulez vraiment partir ? voilà ce qu’il vous en coûtera ! » Et la note du divorce s’annonce salée.

La CNCM annonce ce mardi dans un communiqué qu’elle a mandaté la banque Lazard pour évaluer « toutes les conséquences financières (rétrocession et indemnisation) d’une éventuelle désaffiliation« .

« Sur la base des 3,5 milliards [d’euros] de réservesaccumulées au sein du Crédit Mutuel Arkéa et de ses caisses locales, la rétrocession au groupe Crédit Mutuel du bénéfice de mutualisation créé par la collectivité des clients et sociétaires » réclame la Confédération.

Elle veut sa part des bénéfices mis en réserve par Arkéa arguant qu’ils ont été générés grâce au régime de la mutualisation (la marque, la note de crédit consolidée du groupe pour emprunter, etc). Une estimation qui s’annonce ardue mais que la Confédération attend dans quelques jours. L’organe central estime que les sociétaires des caisses d’Arkéa qui souhaiteraient rester au sein du Crédit Mutuel seraient « spoliés » si cette part des réserves n’était pas rétrocédée au groupe.

« Indemnisation des dommages »

Ensuite, la Confédération nationale, qui a adopté cette délibération lors de la réunion de son conseil d’administration ce mardi, en présence du représentant d’Arkéa, exige :

« l’indemnisation du Crédit Mutuel pour les dommages créés, en particulier la nécessité de redéployer son réseau dans le Sud-Ouest et en Bretagne, rendue nécessaire par l’obligation de continuité territoriale, propre à sa mission de service public et à sa volonté de financement et d’animation au plus près des territoires. »

L’organe central du groupe mutualiste se fonde sur une décision du tribunal administratif de Paris en septembre 2016, soulignant que le groupe doit veiller au maintien d’un « réseau équilibré sur tout le territoire » pour traduire le « principe de territorialité » (chaque groupe a son périmètre et ne doit pas empiéter sur les plates-bandes du voisin), établi par la loi, en une notion de « continuité territoriale. » La CNCM avait jusqu’ici présenté l’installation de caisses du Crédit Mutuel en Bretagne et dans le Sud-Ouest comme une menace de concurrence à Arkéa, et non comme une obligation. Le montant réclamé dépendra du nombre de caisses choisissant la rupture et celles restant au sein du Crédit Mutuel : la Confédération espère bien que la perspective de ce coûteux divorce découragera les présidents de caisses locales.

Entre mars et avril, plus de 300 caisses du groupe breton Crédit Mutuel Arkéa ont voté à 94% en faveur du projet d’indépendance et de construction d’un groupe distinct du Crédit Mutuel en abandonnant la marque.

logo Arkéa credit mutuel

[Le logo officiel du Crédit Mutuel à gauche, celui d’Arkéa à droite]

Abandon de la marque et du logo

D’ailleurs, la Confédération pose dans les autres conditions cet abandon de la marque (déjà prévu par Arkéa) mais aussi du logo actuellement utilisé par le groupe breton, une version revisitée des trois ronds blancs sur fond rouge du Crédit Mutuel en une sorte de triskell. La CNCM avait même attaqué son affilié pour contrefaçon. Elle demande désormais « le développement d’une marque et d’un logo ne créant ni confusion, ni parasitisme. »

Arkéa n’a pas commenté les prétentions financières de la Confédération dans son communiqué en réaction :

« Le groupe Arkéa prend acte de ce que la Confédération nationale du Crédit Mutuel envisage désormais la mise en oeuvre de l’indépendance d’Arkéa. En revanche, le groupe Arkéa rappelle que la CNCM ne dispose pas des prérogatives pour fixer unilatéralement les conditions de cette sortie » réplique-t-il.

Le groupe assure poursuivre les travaux engagés avec les autorités bancaires en vue d’aboutir à un schéma de sortie. Cependant, la reprise du dialogue, demandée par les pouvoirs publics, n’a toujours pas eu lieu. L’organe central a posé comme préalable le retrait de tous les contentieux, notamment les poursuites au pénal engagées contre Nicolas Théry, le directeur général de la CNCM Pascal Durand, et six autres dirigeants.

 

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