Banque, assurance, téléphonie, monétique, télésurveillance résidentielle : les conseillers du Crédit Mutuel voient leur panoplie d’activités s’élargir de plus en plus. Pour densifier la relation commerciale dont ils ont la responsabilité. Pourquoi une telle stratégie ? Explications.
Pourquoi donc le Groupe Crédit Mutuel CM11 vend-il des téléphones et des abonnements téléphoniques dans ses agences ?
Publié le 14/02/2018
À l’occasion de la présentation des résultats 2017 (voir plus bas) le groupe bancaire s’est même flatté d’être le premier opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO) à offrir à ses clients le choix entre trois opérateurs.
On s’attendait plutôt à ce qu’il vante le rendement de ses parts sociales (1,40%), ou ses produits de banque et d’épargne. Alors que la majorité de ses concurrents se contentent du crédit immobilier comme produit d’appel, le Crédit Mutuel, lui, s’efforce de gagner des clients avec ses offres extra-bancaires assurances dommage, monétique, immobilier, téléphonie…
Bref de devenir «un réseau multiservices de proximité» comme le désigne Nicolas Théry, président du groupe Crédit Mutuel CM11 qui inclut le CIC.
Après l’assurance, le groupe a donc été le premier à déterrer la hache de guerre face aux appétits des opérateurs téléphoniques en service de paiement. Il vend téléphones et abonnements.
La concurrence des GAFA
Numéro un français en monétique, il a persévéré dans le paiement mobile, développant notamment son application de paiements mobiles, de fidélité et de facilités de paiement, Fivory, devenu Lyf Pay, quand les opérateurs téléphoniques échouaient à imposer leur dispositif de paiement mobile Buyster.
Face à Orange Bank qui revendiquait 50.000 clients fin 2017, le Crédit Mutuel promeut Avantoo, une offre mixte banque et téléphone. Avec conseiller dédié, comme pour les clients du groupe Crédit Mutuel.
Avantoo apportera des prospects à ferrer plus tard grâce aux offres diverses et variées présentes et à venir. En assurance automobile (+6,3% l’an dernier), l’application Crédit Mutuel permettra dès ce mois de mars d’obtenir un devis d’assurance auto en trois photos (relevés de l’assurance en cours, carte grise, permis), un produit d’appel donc.
Le groupe prépare aussi une offre de location automobile donnant accès quelques mois par an à de plus grosses cylindrées.
Est-ce parce que la banque de détail est une activité moins rentable, même si elle assure encore 67% du produit net bancaire (PNB) et 57% du résultat net ? L’assurance, elle, apporte déjà 12% du PNB et 23% du résultat net.
Pour l’heure les résultats des autres diversifications ne sont pas encore significatifs. Mais il faut nourrir un réseau de 4.000 agences si l’on ne veut pas le voir fondre. Il s’est rétréci d’une petite quarantaine d’agences l’an dernier : des agences sont fermées dans les zones moins peuplées mais d’autres s’ouvrent au sud.
Ce sont donc des paris pour l’avenir face à la concurrence des GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple), des opérateurs télécoms et des fintechs. Un danger que Nicolas Théry, président du CM11 brandit comme un épouvantail.
Et de citer Amazon Lending qui fort de sa base clients de 2 millions de PME, leur propose des prêts. Il connait les flux, les stocks et la qualité de service et en a profité pour leur accorder 3 milliards de prêts en trois ans.
De son côté, même s’il a accru de 14% ses crédits aux équipements l’an dernier, le Crédit Mutuel ne pourrait combattre à armes égales. Amazon vient aussi de lancer son activité d’assurance santé auprès de ses salariés et ceux de ses associés (Berkshire Hathaway et JPMorgan).
Fidèle aux préceptes mutualistes de son créateur Frédéric-Guillaume Raiffeisen, le groupe n’est pas coté en Bourse. Il en a même retiré l’an dernier le CIC, fleuron obtenu en 1998 à l’occasion des privatisations.
L’assurance développée dès 1971 dans tous les segments (vie, MRH, auto, santé….), compte déjà 10 millions de clients ( 29,6 millions de contrats). Avec la banque, c’est une cassette à préserver.
1,7 million de clients dans la téléphonie
D’autant que le dynamisme de l’assurance de biens et risques (+5,9%) compense la décrue subie dans l’assurance vie (-12,6%). La téléphonie suit avec 1,7 million de clients, la télésurveillance résidentielle a gagné 446.000 clients (31% du marché français), et l’agence de vente de logements neufs, déjà forte de 10.000 clients veut grandir dans l’ancien.
Le potentiel est immense puisqu’au total le nombre de clients du groupe qui a racheté Cofidis et est aussi présent en Espagne et en Allemagne s’est accru l’an dernier de 2,5% à 24,3 millions dont 6,9 millions dans le réseau bancaire français CM11 CIC qui revendique 17% de part de marché (50% en Alsace).
Encore faut-il que les conseillers bancaires mis au cœur du dispositif promeuvent ces services de proximité, sans incitation financière puisqu’il n’y a plus d’autres incitations sur les ventes que les primes et participations aux bénéfices allouées collectivement par chaque Caisse de Crédit Mutuel.
À la place un budget de formation de 6% de la masse salariale, des outils de gestion de la relation clients les plus avancé grâce à l’assistant virtuel Watson d’IBM qui les aident notamment à répondre aux 40 millions de mails reçus par an.
Ce système d’intelligence cognitive aurait déjà acquis un taux de fiabilité des réponses déjà supérieur à 90% dans l’assurance auto, habitation, l’épargne, le crédit consommation et la prévoyance énumère la direction. Il aurait augmenté leurs compétences, permis de dégager du temps commercial, d’écoute et de compréhension des clients.
Résultats financiers 2017 : le profit net affecté par une charge fiscale exceptionnelle
Le bilan de l’année 2017 n’est pas mauvais. Le groupe Crédit Mutuel CM11 qui inclut le CIC a terminé l’exercice 2017 sur un produit net bancaire en hausse de 4,2% (14 milliards d’euros) et un résultat d’exploitation en hausse de 9,3%.
Les crédits progressent de 5,3%, (à la consommation + 6,6%, à l’habitat + 4%, à l’équipement des entreprises +14%). La filiale de Crédit à la consommation Cofidis n’a jamais réalisé une aussi bonne année.
L’épargne croit aussi de 5,2%. Mais le résultat net recule de 10,5% à 2,4 milliards d’euros sous l’effet de la surtaxe exceptionnelle d’impôts sur les sociétés pour compenser l’annulation de la taxe sur les dividendes dans le budget de l’État. Sans ce prélèvement, le résultat net aurait progressé de 3,8%.
Hémorragie dans l’assurance emprunteur
Le groupe se serait mieux porté aussi sans une provision exceptionnelle en prévision d’une hémorragie dans l’assurance emprunteur en raison de l’entrée en vigueur de la loi sur la consommation avec son amendement Bourquin autorisant la résiliation substitution annuelle.
S’il se flatte d’avoir résisté aux dispositions facilitant la mobilité bancaire avec un gain net de 70.000 clients, il parait plus inquiet sur l’assurance emprunteur.
Même si en parade, il compte lancer en avril une nouvelle offre plus compétitive et plus affinée en fonction des tranches d’âge comme le sont celles des assureurs alternatifs concurrents.
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