Un amendement de dernière minute, introduit par les parlementaires dans la réforme du Code du travail, permet à l’employeur d’imposer le forfait jour à ses salariés, après accord d’entreprise. Ils ne pourront plus le contester, sous peine de licenciement. Les syndicats s’insurgent.
C’est ce qui s’appelle faire les choses en douce. On pensait que toutes les mesures explosives de la réforme du Code du travail avaient déjà été abordées. Mais c’était sans compter sur les ajustements décidés par des sénateurs et des députés réunis en commission mixte paritaire. Ils ont adopté un amendement de dernière minute, ajouté à la sixième ordonnance de la réforme du travail, qui ne devait normalement servir qu’à rectifier des coquilles. Mais, comme le révèle Mediapart, les parlementaires ont décidé d’y ajouter la possibilité pour l’employeur d’imposer le forfait jour à ses salarié, à la condition d’un accord préalable avec les syndicats.
Surtout, le salarié n’aura plus la possibilité de s’y opposer : refuser le passage au forfait jour pourrait lui valoir un licenciement. Pour rappel, le forfait jour est régime dérogatoire du temps de travail qui permet de travailler jusqu’à 11 heures par jours, donc de dépasser les 35, 37 ou 39 heures hebdomadaires. Pour l’employeur, ce système a pour avantage de lui éviter le paiement d’heures supplémentaires, en échange toutefois de contreparties négociées dans un accord collectif. Jusqu’à présent, le forfait jour était basé sur le volontariat, ce qui permettait à chaque salarié de pouvoir s’y opposer individuellement.
Côté syndicats, les réactions à cette nouvelle mesure sortie du chapeau parlementaire ne se sont pas fait attendre. “C’est une véritable trahison du discours, On ne peut accepter qu’un amendement, sur un sujet aussi contesté que le forfait jour, permette à un accord collectif de s’imposer au contrat de travail”, a notamment réagi, amer, François Hommeril, président de la CFE-CGC, le syndicat des cadres, interrogé par Mediapart. Chez la CGT, on ne pense pas que beaucoup d’entreprises s’empareront de cette nouvelle possibilité mais on s’inquiète d’une révision, au désavantage des salariés, des accords existants. Et les syndicats n’en sont pas à leur première surprise : ils ont aussi dû avaler, toujours via la même commission mixte paritaire, la fin de l’obligation d’instances de dialogue social dans les réseaux de franchisés… que la CFDT avait obtenu après d’âpres négociations pendant les débats sur la loi El Khomri.
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