Pour se prémunir contre les sanctions des régulateurs et pour répondre aux demandes d’ouverture de compte à la minute, les banques musclent leurs systèmes d’identification de leurs clients. Des chantiers coûteux et de longue haleine.
Les alertes du gendarme bancaire sur les manquements de La Banque Postale à ses obligations de lutte contre le financement du terrorisme lors de l’octroi de « mandats cash » en attestent : les régulateurs demandent toujours plus de vigilance aux banques dans l’identification de leurs clients. Récemment, Société Générale et BNP Paribas ont aussi été épinglées pour des manquements dans leur lutte contre le blanchiment.
Pour éviter de nouvelles amendes et se prémunir des cyberfraudeurs, tout en se dotant de systèmes capables d’ouvrir un compte en quelques minutes comme le veut le standard imposé par les néobanques, les établissements ont décidé de se mobiliser.
Ouvrir un compte à l’aide d’un selfie
« Tous les grands réseaux travaillent à l’amélioration de leurs processus d’entrée en relation : ils se sont rendu compte que la complexité de leurs processus de « KYC » (pour Know Your Customer) pouvait leur faire perdre des clients… », explique Jérôme Grelier associé chez Accenture. De fait, les technologies de lecture automatique des caractères ou encore de biométrie permettent de simplifier radicalement les choses, aux yeux du client.
Société Générale teste par exemple un outil qui doit être lancé début 2018 pour identifier ses nouveaux clients, non plus par un rendez-vous en agence, mais à l’aide d’ une reconnaissance faciale . Récemment validé par la CNIL, l’outil permettra d’ouvrir un compte à l’aide d’un selfie. De son côté, Crédit Agricole travaille aussi sur un outil capable de valider et d’extraire les informations de documents officiels transmis par les clients automatiquement, pour leur éviter des rendez-vous fastidieux.
Repenser la collecte de données
Ces innovations ne dispensent toutefois pas les banques de repenser en profondeur leur collecte de données. « Il y a un enjeu colossal de repenser les processus pour les rendre plus agiles, chaque réglementation (Facta, Mifid 2, etc.) donne souvent lieu à des collectes de données cloisonnées. En parallèle, les banques doivent aussi gérer l’héritage du passé, c’est-à-dire la mise à jour de leurs stocks de données de « KYC » qui concernent des clients existants, certaines ont pris un retard important », détaille Jérôme Grelier.
Pour s’y atteler tout en réduisant leurs coûts, plusieurs banques françaises ont opté pour une mutualisation de leurs processus internes. De sorte qu’un client identifié par l’une de leur filiale puisse souscrire un service d’une autre de leur filiale plus aisément. Ce chantier est en cours par exemple chez BNP Paribas et au Crédit Agricole.
Dans le groupe BPCE, la filiale de la Bred, Vialink, vient par ailleurs de lancer une offre dédiée à l’identification des clients qui gère – outre les ouvertures de comptes de la Bred- celles de la filiale de BPCE spécialisée dans les paiements, Depopass .
Les Regtechs à la manoeuvre
Dans ce contexte, les Regtechs – ces start-up spécialisées dans les enjeux réglementaires – continuent de muscler leurs offres. « Le sujet du « KYC » est de loin le plus exploité par ces acteurs », estime Julien Maldonato, associé chez Deloitte. Le cabinet de conseil à d’ailleurs lancé sa propre solution baptisée « KYCstart » pour proposer à ses clients de gérer leur collecte de données et leur vérification.
Le succès de ces outils d’externalisation se limite toutefois aux éléments les plus standards de l’identification des clients ou à l’apport de brique technologique. « Il y a un réflexe de protection des données clients dans les établissements : les notes de confiance accordée par les banques à leurs clients peuvent aussi devenir des notes marketing et déterminer leur approche commerciale. Les logiques de mutualisation sont difficiles à mettre en oeuvre dans ce domaine », estime Julien Maldonato.
En savoir plus sur https://www.lesechos.fr
0 comments
Write a comment