+VIDEO Le lancement par un opérateur télécom d’une banque aux objectifs ambitieux est une première. Orange Bank pourrait en outre profiter d’un contexte de marché particulièrement propice.
Après avoir bouclé le rachat de 65 % de Groupama Banque au début de l’année et obtenu un agrément des superviseurs bancaires, Orange s’apprête à lancer sa banque au premier semestre 2017. Les cinq raisons qui font craindre aux banques que le lancement d’Orange Bank constitue une rupture dans leur secteur.
– 1 – La force de frappe du groupe Orange
Le lancement d’une banque aux objectifs très ambitieux par un poids lourd des télécoms constitue une première. « C’est le nouvel entrant le plus prometteur qu’on ait vu depuis très longtemps, souligne un spécialiste du secteur bancaire. Il est plus crédible que les autres dans ses objectifs d’expansion, car Orange a de nombreux clients. » Dans un document interne, dont « Les Echos » ont obtenu copie, Orange met en avant ses « forces pour se lancer dans la banque » : « La puissance de sa marque mondialement reconnue […], la connaissance fine de sa base de 27 millions de clients mobile et 10 millions de clients haut débit », et « la puissance commerciale de son réseau de distribution multicanal ».
« C’est un concurrent de plus, tente de relativiser un grand banquier de la place. Le problème, c’est qu’il peut faire croire aux consommateurs que la banque, c’est quasiment gratuit. » Pour Daniel Karyotis, ancien directeur général de BPCE en charge des finances et des risques et désormais patron de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes, « Orange Bank est une menace pour les banques, compte tenu du nombre de clients d’Orange. On ne peut pas regarder son arrivée avec un regard condescendant. »
– 2 – L’expérience d’Orange dans les services financiers
Orange dispose d’une offre de paiement mobile en Afrique et en Europe . Vrai succès, Orange Money, un service mobile de paiement (achat de crédits téléphoniques, paiement dans les commerces, règlement de factures) et de transfert d’argent, est disponible dans 14 pays d’Afrique et au Moyen-Orient. Il totalise plus de 20 millions de clients. En Pologne, Orange a un service bancaire complet, dont il compte s’inspirer pour la France. Il s’est associé à mBank, la troisième banque du pays, pour développer une application permettant de payer, transférer et retirer de l’argent, ou encore souscrire à des crédits… Il a réuni 350.000 clients en un peu plus de deux ans.
– 3 – La loi Macron va faciliter la mobilité bancaire
Orange Bank va se lancer dans l’Hexagone sous d’heureux auspices, puisqu’à partir de février 2017 la loi Macron permettra aux clients de changer plus facilement de banque. Concrètement, à partir du 6 février, les banques devront elles-mêmes prendre en charge les démarches nécessaires au changement d’établissement de leurs clients, dans des délais très encadrés. La disposition devrait renforcer la concurrence entre les banques assises sur un marché dont le taux d’attrition reste très faible (fin 2014, il atteignait 4,5 %).
Contrairement aux banques, Orange a déjà expérimenté l’intensification de la concurrence dans les télécoms. « Les opérateurs vivent avec un taux d’attrition très élevé depuis plusieurs années [15 % en France, NDLR ]. Pour être en mesure de retenir leurs clients, ils se sont équipés d’outils d’analyse de données poussés. Aujourd’hui, ils paraissent mieux outillés que les banques dans ce domaine », estime Daniel Pion, associé chez Deloitte.
– 4 – La banque mobile a un fort potentiel de croissance
Le projet d’Orange est de lancer une « banque de poche » . L’offre sera certes disponible dans 140 boutiques de l’opérateur télécoms, mais son objectif est d’en faire une banque digitale, pour laquelle les clients s’enrôleront directement sur leur smartphone. Or ce marché offre encore un fort potentiel de croissance. Les banques en ligne sont parvenues à installer un climat de confiance dans l’opinion , mais aucune n’a accaparé le marché.
Selon les chiffres cités en interne par Orange, le marché de la banque directe pèse 2 à 3 millions de clients en France et 35 milliards d’euros d’encours, contre 18 millions de clients en Allemagne pour 180 milliards d’encours. Les marges de progression sont donc considérables. Selon un spécialiste du secteur, le marché de la banque en ligne pourrait tripler dans les cinq prochaines années.
– 5 – D’autres opérateurs télécoms pourraient suivre
Pour l’instant, seul Orange a entrepris de défier les banques françaises sur leur terrain. Les autres opérateurs ont surtout tissé leur toile dans les services de paiement sur facture, qui permettent de régler un achat en ligne lors du prélèvement d’un forfait de téléphone. Ils ne manquent néanmoins pas d’ambitions. Selon nos informations, SFR a engagé des discussions avec des banques françaises pour concevoir un porte-monnaie électronique.
Par ailleurs, l’opérateur prépare le lancement d’une offre de terminal de paiement mobile pour les commerçants en 2017. Baptisé « Let’s Pay by SFR », cette solution viendra concurrencer les offres des banques ou des fintech qui permettent de transformer un smartphone en terminal de paiement. « Notre rôle est de développer les usages mobiles », explique Pierre-Emmanuel Struyven, directeur de l’innovation de SFR, qui dit ne pas nourrir d’ambitions dans la banque pour le moment. De son côté, Free non plus n’a rien entrepris dans ce domaine. L’opérateur avait toutefois déposé la marque « FreeBank » auprès de l’Inpi en juin 2000. Juste au cas où il changerait d’avis.
VIDEO – Pourquoi Orange fait-il peur aux banques ?
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